«Le taux de croissance des salaires réels est tombé de 1,6% en 2012 à 0,9% en 2015.» C’est ce que l’Organisation internationale du travail a fait savoir dans son dernier rapport sur les salaires. Dans ce document, l’Oit montre qu’il y a un «ralentissement de la croissance des salaires à l’échelle mondiale».

Les inégalités dans la répartition des salaires dans le monde sont toujours réelles. Selon un rapport de l’Organisation internationale du travail (Oit), il y a un «ralentissement de la croissance des salaires à l’échelle mondiale». Dans son rapport mondial sur les salaires, l’Oit montre qu’après la crise financière de 2008-2009, «la croissance des salaires réels dans le monde a connu une reprise en 2010, mais pour ensuite ralentir, passant de 2,5% en 2012 à 1,7% en 2015, son niveau le plus bas sur quatre ans». D’après ces études, «si l’on exclut les chiffres de la Chine où la croissance des salaires est plus forte qu’ail­leurs, le taux de croissance des salaires réels est tombé de 1,6% en 2012 à 0,9% en 2015».
Selon l’Oit, le niveau des salaires et l’inégalité de leur répartition ne sont pas déterminés par les seules caractéristiques com­me le niveau d’instruction, l’âge ou l’ancienneté en rapport avec les qualifications des individus, mais par de nombreux autres facteurs qui apparaissent déterminants. Il s’agit entre autres du sexe, de la taille de l’entreprise, du type de contrat, de la branche d’activité. «Les statistiques sur un échantillon de pays développés et en développement montrent qu’un diplôme universitaire ne garantit pas nécessairement l’exercice d’un emploi fortement rémunéré, que les branches de la finance et de l’immobilier sont surreprésentées au sommet de l’échelle salariale, que la proportion de femmes décroît régulièrement à mesure que l’on s’élève le long de cette échelle», a-t-on expliqué. Partant de l’exemple de l’Europe, l’Oit révèle dans son rapport que les femmes de ce continent «représentent en moyenne 50 à 60% des travailleurs des trois déciles les moins bien rémunérés, proportion qui descend à 35% dans le décile supérieur, et même à moins de 20% dans le centile supérieur». D’après les auteurs de ce document, «le contraste est encore plus fort dans certains pays émergents et en développement».
Conséquences des inégalités salariales
La stagnation des salaires moyens et le déclin de la part du travail ne sont pas sans conséquences économiques et sociales. Selon l’Oit, du côté social, «le découplage entre la croissance économique et celle des salaires implique que les travailleurs et leur famille vont estimer ne pas recevoir une juste part des fruits du progrès économique, ce qui alimentera leur frustration».  S’agissant du côté économique, «la faiblesse de la croissance des salaires pèsera sur la consommation des ménages, donc sur la demande globale, surtout si les salaires stagnent en même temps dans plusieurs grandes économies». Pour l’Oit, lorsque l’économie peut l’assumer, «une croissance plus forte des salaires doit donc être soutenue ou stimulée». Mais pour l’Organisation internationale du travail, «cela peut ne pas être le cas dans tous les pays, car dans certains d’entre eux, une plus forte croissance des salaires peut augmenter le coût de la main-d’œuvre au-delà de ce qui est supportable par les entreprises et pour l’emploi». Cela peut avoir comme conséquence «une réduction des exportations ou des investissements».
Partant de ce constat, l’Oit recommande l’adoption d’approches différenciées, «spécifiques aux situations nationales». D’après les auteurs de ce rapport, il faut «en effet éviter que de trop nombreux pays ne mènent simultanément des politiques de modération salariale ou ne procèdent à des coupes salariales pour soutenir la compétitivité et les exportations». Ce procédé risquerait d’entraîner «une chute de la demande globale ou une déflation à l’échelle régionale ou mondiale». Con­cer­nant les politiques nationales spécifiques, l’Oit soutient qu’une «action vigoureuse et ambitieuse est nécessaire pour mener à tous les niveaux des politiques qui assurent une croissance durable des salaires et qui garantissent à tous une juste part des fruits du progrès». De même, elle souligne que «ces actions politiques doivent prendre en considération les tendances de long terme aussi bien que les évolutions récentes». «Pour être appropriées, elles doivent avant tout porter sur les facteurs spécifiques qui orientent de façon positive ou négative l’évolution des salaires et les inégalités salariales», a-t-on fait savoir. Il est aussi demandé de prendre en compte dans ces politiques nationales «les caractéristiques et les éléments moteurs de chaque économie, tout en ayant conscience que de nombreuses tendances à l’œuvre se répercutent fortement sur d’autres pays qui ont des niveaux de développement similaires».
dkane@lequotidien.sn