Première importatrice de la production rizicole asiatique, l’Afrique doit se positionner pour gagner le combat de l’autosuffisance en riz. Une nécessité compte tenu de la récession prédite de la production de l’Asie pour cette céréale qu’elle pourrait commencer à importer à partir de 2020. Le ministre de l’Agriculture et de l’équipement rural a donné en perspective les clés pour une Afrique se nourrissant et nourrissant le monde en riz. Dr Papa Abdoulaye Seck n’a pas manqué de recadrer les détracteurs des politiques d’autosuffisance.

Largement dépendante du continent asiatique qui détient  près de 77%  des exportations mondiales de riz et dont des scientifiques prédisent une nette récession de la production, l’Afrique est dans l’obligation de résoudre l’équation riz. C’est l’argument brandi par le ministre de l’Agriculture et de l’équipement rural. «D’éminents scientifiques ont démontré qu’à partir de 2020, l’Asie peut être un net importateur de riz. Alors si ce continent qui contribue à hauteur de 77% devient un net importateur, alors il y a problème», a expliqué hier, Dr Papa Abdoulaye Seck, dans son discours d’ouverture de la conférence ministérielle africaine de haut niveau sur le riz tenue à la sphère ministérielle de Diamnia­dio. «Quand on nous dit qu’en 2035, 2050, l’Afrique va importer tant de tonnes, la question que je me pose c’est : l’Afrique va importer à partir de quel continent. Il n’y aura pas cette offre qu’il faut importer», a-t-il averti, tout en magnifiant les efforts des pays africains dans la quête de l’autosuffisance. «Il est juste de dire et de souligner que nos pays ont raison de chercher à atteindre l’autosuffisance rizicole, parce qu’il y a un rétrécissement graduel de l’offre rizicole lié à la perte de vitesse en ce qui concerne la production asiatique», a défendu Pr Seck. «Le continent africain renferme d’innombrables potentialités. Ces potentialités exploitées de façon optimale doivent nous permettre de pouvoir nous nourrir et de nourrir le reste du monde», a-t-il encore assuré.  Dans cette marche vers l’autosuffisance en riz, l’Afrique devra hâter le pas, compte tenu des enjeux. «Il faut qu’on s’empresse d’agir.  Il faut aller droit au but et c’est ça qui permet de gagner la bataille du riz pour notre continent», a exhorté le ministre de l’Agriculture, qui s’exprimait devant une dizaine de ses pairs africains, ainsi que de membres des institutions partenaires. D’après Pape Abdou­laye Seck, l’autosuffisance en riz, comme celle pour tout autre produit, demeure un objectif spécifique s’intégrant dans l’objectif global de politiques agricoles qui est la sécurité alimen­taire. «L’autosuffisance est un objectif spécifique de produit agricole. On n’a pas à choisir entre les deux, parce que l’autosuffisance est dans la sécurité alimentaire. Nous sommes pour une sécurité alimentaire et nutritionnelle durable ici au Sénégal ; c’est notre objectif global et nous avons des objectifs spécifi­ques», a-t-il servi comme message  à ceux qui font «une confusion conflictuelle» entre autosuffisance et sécurité alimentaire. Mettant à contribution son statut d’homme du sérail, Pr Seck a prodigué une douzaine de messages à ses pairs pour une résolution de l’équation. Au nombre de ceux-ci, l’adossement des politiques d’autosuffisance à une approche systémique, l’accroissement du niveau de mécanisation dans le secteur…

Dr Pape Abdoulaye Seck, ministre de l’Agriculture : «Il faut de bonnes réformes foncières dans nos pays»

Le foncier est au cœur de l’activité agricole et pour la booster au maximum, des réformes sont nécessaires. Pape Abdou­laye Seck a fait un plaidoyer hier pour des réformes importantes à propos de la terre. «On ne peut massifier les investissements dans le secteur sans réformes foncières. Il faut de bonnes réformes foncières dans l’ensemble de nos pays», a soutenu le ministre de l’Agriculture. Lesquelles réformes, selon Dr Seck, «vont permettre une cohabitation entre exploitation familiale modernisée et secteur privé dans le cadre d‘un partenariat ga­gnant-gagnant». «Il n’y aura pas de transfert définitif de titre de propriété, mais plutôt l’exploitation de complémentarité où le privé apporte quelque chose dans le cadre d’un partenariat pour pouvoir bénéficier d’une terre et qu’il n’y ait pas de marché foncier rural qui pourrait être véritablement synonyme d’accaparement des terres», a-t-il dressé comme contour des réformes à faire. «La terre se raréfie, se dégrade et comme nous avons l’habitude de le dire, elle va être le pétrole de demain et on n’a jamais vu des pays dire donnez-moi l’emplacement où se trouve le pétrole pour le vendre», a dit le ministre pour relever l’importance de la terre. Suffisant alors pour décréter la bonne formule, selon lui. «Il faut que nous conservions nos terres, mais que nous créions les conditions pour une sécurisation de l’investissement privé sans un transfert définitif de propriété. C’est cela que nous appelons un partenariat gagnant-ga­gnant», a expliqué Dr Seck.

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